Cubjac: affrontement dans la garde nationale (septembre1789)

 

Les luttes de pouvoir au village et le rôle de la maréchaussée : affaire de la Garde nationale de Cubjac (27 septembre) B834


      Nous avons analysé aux chapitres 7 et 8 comment se sont mises en place les nouvelles institutions communales, comité et garde nationale (ou troupe patriotique ) et comment elles ont été les enjeux d’un véritable affrontement politique au village entre  des groupes parfois socialement identifiables. Cet affrontement politique pouvait provoquer d’un côté ou de l’autre des griefs que dès le 7 août, dan son acte de fondation, le Conseil des communes s’était proclamé seul légitime à trancher. Ses hésitations ou peut-être la crainte qu’il ne  rende pas l’avis qui leur conviendrait pousse à partir  de septembre au recours à la maréchaussée.IL faut pour pouvoir user de ce recours prouver que l’adversaire a crée un trouble public, relevant de l’attroupement armé séditieux pouvant porter atteinte aux personne et relevant en somme du trouble à l’ordre public, de l’atteinte aux personnes ou aux biens, niant la légitimité du débat politique au sein des communes qui se gouvernaient

     Ce qui se passe fin septembre à Cubjac est une illustration très intéressante de cette situation parce qu’elle obéit à un scénario bien repérable. Nous le retrouvons, comme c’est souvent le cas dans la plainte à la maréchaussée puis dans l’information conduite par celle-ci.

 

1-La formation de la garde nationale

 

L’’instruction conduite par la maréchaussée, le 10 octobre, est portée par Guillaume Durand . Celui-ci est  lieutenant de la juridiction de Cubjac  c'est-à-dire appartient au personnel seigneurial. IL précise dans sa plainte comment on l’a nommé-

« Que le jour de ND d’Août, veille de la grande foire à Cubjac, il se fit une assemblée très nombreuse pour former une milice bourgeoise, le suppliant fut d’une voix unanime nommé capitaine  commandant de la compagnie des grenadiers qui le reconnut et prêta serment de lui obéir. Il la mit en ordre, lui fit faire l’exercice et monter la patrouille .En cela même, il ne fit rien de nouveau car depuis très longtemps il était dans l’isage de faire faire la patrouille sur les ordres qu’il en avait reçus de MM les gouverneurs et commandants de la province.

    Un des témoins de l’instruction , Nicolas Martin, ancien cocher, indique que « dans le courant du mois de juillet ou le premier jour du mois d’août, le sieur Brouilhet  fils du juge de Cubjac, fit  assembler tout le monde, que l’on forma 5 compagnie(s)  que le Sieur DURAND fut nommé Capitaine commandant » ce qui nous ramènerait au temps de la Peur.

     Quelle que soit la date, on est bien alors dans le recours, devant les menaces qui se sont déjà manifestées fin juillet et dont on craint qu’elles se reproduisent, à des notables experts pour former la troupe. Le Comité a-t-il été formé avant ou après : la question n’est pas abordée ?

 

2°la vacance du pouvoir

Peu de temps après, précise le même témoin, le nouveau commandant «  fut incommodé et s’en fut prendre les eaux, qu’il revint il y a 15 jours » soit le 27 septembre. Pendant cette absence, le pouvoir de commandant vacant a été assuré par le notaire royal Desveaux . Secréraire devait être une fonction du comité ce qui montre l’intrication des deux institutions.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

3° L’affrontement entre les deux commandants et l’intervention de la maréchaussée

Dès son retour le 27 septembre, Durand fit assembler  la troupe pour la bénédiction. Trente hommes obtempérèrent .Desveaux  réagit immédiatement et l’apostropha « Vous n’êtes pour rien là, ce n’est pas votre place ». Durand rétorqua en traitant son successeur « cabaleur » « qu’il cherchait à troubler le repos public ». Desveaux  brandit sa canne,  Durand demanda  « un fusil que je bourre ce gueux-là ».

          Le père de  Desveaux ,cabaretier,intervint et pria son fils de le suivre. De son côté, Durand installa ses hommes à l’église pour entendre vêpres puis les conduisit  sous la halle pour l’exercice. « Quoiqu’on dit que je ne suis rien, aurait-il lancé à ses hommes, je vais montrer que je suis quelque chose. J’ai commandé à souper pour vous régaler ».Une quinzaine de grenadiers répondit à l’invite  et après le dîner patrouilla jusqu’à 1 h du matin. Mais non sans incident « Que de ceux qui se retirèrent, dit un témoin, en sortant de table, il y a le nommé Baillot, qui a le vin fougueux et fit des extravagances ».

        Le témoignage du curé évoque de son côté  la suite de l’altercation de l’après-midi. Si le père de Desveaux, cabaretier a conduit son fils chez lui, c’est qu’une assemblée d’une partie du comité s’y était tenue et avait rédigé un procès verbal qu’on fit ensuite approuver aux autres membres du comité : il s’était agi de décider de  porter  plainte auprès de la maréchaussée. Quelques jours après,  des cavaliers vinrent  arrêter Durand. Il ne semble pas qu’il ait été saisi.  A Une nouvelle assemblée du comité, le curé témoigne avoir  pris  la défense de Durand ce qui lui avait valu des invectives  de  Desveaux  mais aussi  les reproches du  baron de Lastours  lui indiqua qu’il aurait mieux fait de se taire.

 

4°La contrattaque de Durand

   Pour sortir de la situation, le comité proposa à Durand une  transaction : qu’il  fasse des excuses et , surtout paie les  5 louis qu’avait coûté l’intervention de la maréchaussée soit  100. IL  remettrait cette somme entre les mains des députés qui se sont rendus à Périgueux.

     Cela signifie que l’on avait aussi tenté d’obtenir un jugement du Conseil des communes. Mais comme nous l’avons souligné, celui-ci , échaudé par l’affaire de Savignac, se refusa à intervenir.

   D’ailleurs c’est Durand qui à son tour porta plainte auprès de la maréchaussée « contre  Desveaux, notaire royal, accusé de sédition, émotion populaire, trouble. »

Desveaux, nouvellement retiré du service, jeune homme d’un caractère inquiet, bouillant et mauvais fils du cabaretier »

C’est donc cette plainte dont nous disposons ici. Notons qu’à l’avantage de Durand témoigne  encore  un jeune qualifié de « bourgeois » JB Gargaud , âgé  20 ans, accuse qui Desveaux de s’être nommé de lui même et d’être dépourvu de compétence,  »ne reconnaissant (dans) l’art de commander que le Sr Durand. Il y ajoute les insultes reçues de Deveaux. De la même façon un - 3° témoin éclare ne reconnaître d’autre commandant que Durand. On notera que Durand   prit LAMARQUE pour avocat ce qui de toute façon impliquait le conseil.

 

Quel bilan tirer de cette affaire ?

-On pourrait y voir l’affrontement entre les tenants de l’ordre traditionnel conduits par Durand et son allié le curé. Mais on notera la présence dans la partie adverse du juge et le soutien ouvert de Lastours.

-Le refus d’arbitrage du conseil pourrait  orienter vers un conflit de personnes, de leaders de village. D’ailleurs Durand désigne dans le juge Brouillet  le meneur poursuivant  contre lui « de vieilles querelles de famille »

 

 

-On notera enfin la présence de la maréchaussée. Pas plus que le Conseil elle ne parvient à un arbitrage. n notera en revanche le cpût de son intervention : 100 livres ce qui peut permettre de penser qu’elle était davantage un instrument au service des notables.

 

 



04/02/2012

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